Page:Swift - Gulliver, traduction Desfontaines, 1832.djvu/170

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jugé en ma faveur, et que je gagnai même avec les dépens. Il me demanda combien de temps on employait ordinairement à mettre une affaire en état d’être jugée ; s’il en coûtait beaucoup pour plaider ; si les avocats avaient la liberté de défendre des causes évidemment injustes ; si l’on n’avait jamais remarqué que l’esprit de parti et de religion eût fait pencher la balance ; si ces avocats avaient quelque connaissance des premiers principes et des lois générales de l’équité, ou s’ils ne se contentaient pas de savoir les lois arbitraires et les coutumes locales du pays ; si eux et les juges avaient le droit d’interpréter à leur gré et de commenter les lois ; si les plaidoyers et les arrêts n’étaient pas quelquefois contraires les uns aux autres dans la même espèce.

Ensuite, il s’attacha à me questionner sur l’administration des finances, et me dit qu’il croyait que je m’étais mépris sur cet article, parce que je n’avais fait monter les impôts qu’à cinq ou six millions par an ; que cependant la dépense de l’État allait beaucoup plus loin et excédait beaucoup la recette.

Il ne pouvait, disait-il, concevoir comment un royaume osait dépenser au-delà de son revenu, et manger son bien comme un particulier. Il me demanda quels étaient nos créan-