Page:Swift - Gulliver, traduction Desfontaines, 1832.djvu/399

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départ fut arrivé, je pris congé de mon maître, de madame son épouse et de toute sa maison, ayant les yeux baignés de larmes et le cœur percé de douleur. Son honneur, soit par curiosité, soit par amitié, voulut me voir dans mon canot, et s’avança vers le rivage avec plusieurs de ses amis du voisinage. Je fus obligé d’attendre plus d’une heure à cause de la marée : alors, observant que le vent était bon pour aller à l’île, je pris le dernier congé de mon maître. Je me prosternai à ses pieds pour les lui baiser, et il me fit l’honneur de lever son pied droit de devant jusqu’à ma bouche. Si je rapporte cette circonstance, ce n’est point par vanité ; j’imite tous les voyageurs, qui ne manquent point de faire mention des honneurs extraordinaires qu’ils ont reçus. Je fis une profonde révérence à toute la compagnie, et me jetant dans mon canot je m’éloignai du rivage.