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DU TONNEAU

toient le Guet, ſe divertiſſoient avec les belles, & s’en trouvoient fort mal. Ils donnoient aux Fiacres des coups de baton, au lieu d’argent. Ils s’endettoient chez les marchans, & couchoient avec leurs Femmes. Ils roſſoient les Sergens, jettoient les violons par la fenêtre, dinoient chez le plus fameux traiteur, & faiſoient la digeſtion au Caffé des petits Maîtres. Ils parloient des appartemens, où ils n’avoient jamais mis le pied ; dinoient avec des Mylords, ſans les voir ; parloient à l’oreille à une Ducheſſe, ſans lui dire le moindre mot ; faiſoient paſſer le griffonnage de leurs blanchiſſeuſes, pour des billets doux de qualité. Ils ne faiſoient que revenir de la Cour, ſans y avoir jamais été vus ; ils étoient au levé du Roi ſub dio ; dans une Compagnie ils apprenoient par cœur une liſte des Pairs du Roïaume, & dans une autre ils en farciſſoient leurs diſcours, d’un petit air fort familier.

Ils ne negligeoient pas ſur-tout de comparoitre regulierement dans l’Aſſemblée de ces Senateurs, qui n’ont rien à dire dans le Parlement, & qui parlent haut au Caffé, où ils s’ajournent