Page:Swift - Le Conte du tonneau - tome 1 - Scheurleer 1732.djvu/234

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
194
LE CONTE

teurs ne communiquoient leurs préceptes à leurs Ecoliers, que par voïe d’Ēructation : ce qu’ils faiſoient avec une grande éloquence, & avec une varieté inexprimable.

Mais, le caractere principal, qui diſtinguoit le plus leurs ſages du premier ordre, étoit une certaine contenance, qui faiſoit comprendre, juſqu’à quel dégré le ſoufle myſterieux les agitoit intérieurement. Ce vent merveilleux, après avoir cauſé d’abord des tranchées, & des convulſions ; après avoir produit, pour ainſi dire, un tremblement de terre dans le Microcoſme du Philoſophe ; s’élevoit en haut par degré, tordoit la bouche, rendoit les jouës bourſouflées, & donnoit un horrible éclat aux yeux. L’Eructation ſuivoit ces grimaces de près. Tous les vents qui leur ſortoient de la bouche paſſoient pour ſacrez : ſurtout, ceux, dont l’odeur étoit la plus forte ; & leurs maigres devots les avaloient avec une conſolation inexprimable. Pour rendre la choſe encore plus touchante, les vents les mieux choiſis, les plus édifians, & les plus vivifians, étoient lâchés par le nez, dont ils prenoient une eſpece de teinture. Ce qui leur donnoit