Page:Swift - Opuscules humoristiques - Wailly - 1859.djvu/132

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beauté inimitable ; outre certaines découvertes utiles qui s’y trouvent, à savoir qu’il y a des évêques en poésie, que ces évêques doivent ordonner les jeunes poètes, et cela en leur imposant les mains ; et que la poésie est une cure d’âmes, et que par conséquent ceux qui ont de telles cures devraient être poètes et trop souvent le sont ; et en effet, comme jadis poète et prêtre étaient une seule et même fonction, l’alliance de ces ministères se maintient heureusement jusqu’à ce jour dans les mêmes personnes ; et c’est là, je suppose, la seule raison plausible de cette appellation qu’ils affectionnent si fort, je veux parler du titre modeste de poètes divins. Quoi qu’il en soit, n’ayant jamais été présent à la cérémonie de l’ordination des prêtres de la poésie, j’avoue n’avoir aucune notion du fait, et j’en parlerai d’autant moins ici.

Les Écritures donc étant généralement la source et le sujet du bel esprit moderne, je n’ai pu moins faire que de leur donner la préférence dans vos lectures. Après vous en être parfaitement imbu, je vous conseillerais de tourner vos pensées vers la littérature profane, ce que je dis pourtant plutôt par condescendance pour les opinions reçues que par conviction personnelle.

Car, vraiment, rien ne m’a plus surpris que de voir les préjugés des hommes au sujet de cette érudition profane, lesquels croient généralement qu’il est nécessaire d’être lettré pour être un bon poète, ce qui est la chose la plus fausse du monde en réa-