Page:Swift - Opuscules humoristiques - Wailly - 1859.djvu/148

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restés en arrière de ceux de cette profession en Angleterre, comme perfection de basse littérature. Le sublime, en effet, n’est pas si commun chez nous ; mais on supplée complètement à ce déficit par l’admirable et le surprenant qui abonde dans toutes nos compositions. Notre excellent ami (le chevalier sus-nommé), parlant de la force de la poésie, dit : « rimer à mort, ce qui (ajoute-t-il) se fait, dit-on, en Irlande ; » et vraiment, cela soit dit à notre honneur, cette faculté nous reste en grande partie jusqu’à ce jour.

Je voudrais maintenant présenter quelques pauvres idées à moi pour l’encouragement de la poésie dans ce royaume, si je pouvais espérer qu’elles fussent agréables. Le cœur m’a souvent saigné de la fâcheuse condition de cette noble profession ici ; et ça été l’objet constant de mes études de chercher les moyens d’améliorer son sort. Et certainement, à considérer quels merveilleux beaux-esprits, dans le genre poétique, surgissent presque chaque jour et nous étonnent dans cette ville ; quels génies prodigieux nous avons ici (dont je pourrais citer des quantités innombrables) ; et avec cela de quel grand avantage il peut être pour notre commerce d’encourager ici cette science, car il est clair que notre fabrication de toiles doit une bonne partie de sa prospérité à l’énorme gaspillage de papier que font les poètes de notre époque ; sans parler de toute l’utilité dont ils sont aux boutiquiers, particulièrement aux épiciers, apothicaires et pâtissiers ; et je