Page:Swift - Opuscules humoristiques - Wailly - 1859.djvu/158

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

temps que je désirais votre union, parce que j’espérais que grâce à vos bonnes dispositions, et en suivant les conseils de sages amis, vous pourriez, avec le temps, vous rendre digne de lui. Vos parents ont eu raison en ceci qu’ils ne vous ont pas beaucoup produite dans le monde, ce qui vous a épargné maint faux pas que d’autres ont fait, et que vous avez moins d’impressions mauvaises à effacer ; mais ils ont eu le tort, comme c’est généralement le cas, de trop négliger la culture de votre esprit, sans laquelle il est impossible d’acquérir ou de conserver l’amitié et l’estime d’un homme sensé, qui se lasse bientôt de jouer le rôle d’amant et de traiter sa femme comme une maîtresse, mais a besoin d’une compagne raisonnable et d’une véritable amie dans toutes les phases de la vie. Il faut donc prendre à tâche de vous rendre propre à cet office, effort que je ne cesserai de diriger tant que je vous en jugerai digne, en vous indiquant comment vous devez agir, et ce que vous devez éviter.

Et gardez-vous de dédaigner ou de négliger mes instructions, d’où dépendra non-seulement la figure que vous ferez dans le monde, mais votre véritable bonheur, aussi bien que celui de l’homme qui doit vous être le plus cher.

Je dois donc vous recommander, en premier lieu, d’être très-lente à quitter votre modeste tenue de jeune fille : d’ordinaire les jeunes femmes ne sont pas plus tôt mariées quelques semaines, qu’elles prennent un air hardi et un ton déluré, comme si