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Page:Sybel - Histoire de l’Europe pendant la Révolution française 2.djvu/112

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108 COMMENCEMENT DE,LA GUERRE ANGLO-FRANÇAISE.

abandonné sans regret, avant la chute du trône. Après avoir sauvé la République du danger dont la menaçait la Prusse, il voyait comme Roland, dans la mort du monarque, le triomphe de ses plus mortels ennemis. Dans les derniers jours encore, il avait tenté plusieurs démarches pour prévenir la catastrophe finalc; mais il s’était alors convaincu une fois de plus de son impuissance. Maintenant, la douleur et la colère le mettaient hors de lui; pour la première fois depuis le commencement de sa vie aventureuse, il envisageait, incertain et décourage, le sombre avenir qui s’ouvrait devant lui. Telle était la disposition d’esprit dans laquelle il se trouvait lorsque de Maulde vint l’exhorter à ne pas désespérer de la patrie. « Laissons les coquins triompher un moment, s’écria de Maulde, l’État subsiste toujours, et demande d’autant plus instamment que nous travaillions à le sauver. » Dumouriez, qui n’était pas fait pour passer ses jours à gémir dans une inactivité stérile, reprit courage, et bientôt un nouvel élan lui fut imprimé par Benoît, à son retour de Londres. Celui-ci lui annonça que Pitt croyait toujours la paix possible, pourvu que l’on remplaçât le remuant et maladroit Chauvelin par un négociateur plus habile, et il ajouta que nul ne lui paraissait plus propre à remplir cette mission que le conquérant de la Belgique. Dumouriez saisit avec ardeur cette nouvelle perspective. Il ne songea plus dès lors qu’à renverser les Jacobins, et il en arriva ’presque à prendre en horreur son plan favori contre la Hollande, par la seule raison que ce plan se rattachait au système politique de ses ennemis. En dépit de tout ce qui s’était passé jusque-là, il résolut de s’employer en faveur de la paix, et il courut au ministère pour tâcher d’obtenir l’ambassade de Londres.

On dut le voir avec étonnement faire cette démarche, lui qui, le 9 janvier encore, avait mis la même ardeur à conseiller la conquête de Flessingue et d’Amsterdam. Pache, Monge et Clavière reconduisirent sans explication; mais, resté seul avec Lebrun, Dumouriez s’aperçut bientôt que la lourde atmosphère de la politique européenne devenait toujours plus odieuse à ce dernier, et il finit par obtenir de lui l’autorisation de faire une nouvelle tentative. Le rappel de Chauvelin fut d’abord signé le 23 janvier; il fut convenu ensuite que de Maulde et Maret se ren-