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PARTAGE DE LA POLOGNE. – LE TRAtTË. 175

équivalente en Ukraine. Goltz respira librement à la réception de cette communication si longtemps attendue. Il s’effraya, sans doute, de l’extension qu’allait prendre le territoire russe; mais, la Prusse ne se trouvant pas en mesure de s’y opposer, le cabinet de Berlin ordonna à l’ambassadeur de passer outre et de discuter les articles du traité. Le premier fruit de cette bonne intelligence tant désirée fut un manifeste publié le 6 janvier 1793, par lequel la Prusse annonçait que les menées des Jacobins en Pologne, rendues doublement dangereuses par la prolongation de la guerre avec la France, mettaient la Prusse dans la nécessité d’occuperles provinces polonaises limitrophes de ses États, dans l’intérêt de sa propre sécurité. Un blâme unanime a condamné cette déclaration, que l’on a considérée comme un acte de grossière hypocrisie. En effet, il est clair que les clubs de Varsovie n’ont pas été la cause première du partage; mais les faits allégués par le manifeste n’en étaient pas moins vrais, c’est-à-dire les préparatifs d’attaque faits de toutes parts contre la Russie et contre les confédérés de Targowice, et faits (ce que la Prusse ne pouvait permettre en aucun cas)de concert avec la France. La Prusse les avait provoqués en partie par ses regrettables fautes diplomatiques de l’éts précédent; mais il n’y avait plus à y revenir, et les destins devaient s’accomplir. Le 4 A janvier, le général MœIIendorf passa la frontière avec cinq colonnes, qui, débouchant simultanément de la Silésie, de la Neumark et de la Prusse orientale, cernèrent du côté de la Pologne tout le territoire qui devait être abandonné à la Prusse.

Cet acte produisit une sensation immense en Europe de toutes parts on s’écria qu’un partage allait avoir lieu, et qu’il ne fallait à aucun prix permettre une telle iniquité. Ce fut surtout le gouvernement anglais qui émit cette opinion avec le plus de véhémence. Lord Withworth à Saint-Pétersbourg, et le chevalierMurray au quartier général prussien, se répandirent en protestations énergiques; quant au cabinet de Londres, il se montra chaque jour plus ardent dans ses efforts pour conserver la paix avec la France et pour la rétablir entre cette puissance et l’Allemagne. Il était évident, en effet, que plus la guerre de la Révolution se prolongerait et prendrait de l’extension, plus la politique envahissante de la Russie aurait le champ libre dans l’Europe