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Page:Sybel - Histoire de l’Europe pendant la Révolution française 2.djvu/193

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PARTAGE DE LA POLOGNE. L’RXËCUTMK. 189 F r~irirni.ane "n" 1., .7 ’1 a

diète sont dirigées par le général Igelstrœm, à l’aide d’ofïiciers d’état-major et de détachements de troupes russes, qui repoussent ceux qui ne sont pas favorables à nos désirs et n’admettent que les gens dociles; je félicite Votre Excellence de n’avoir rien à faire là dedans, car il faut pour cela une certaine expérience qui ne s’acquiert pas dans d’autres pays. »

A ces mesures de violence s’en ajoutaient encore de plus funestes, dont la responsabilité retombe plus tôt sur les vaincus que sur les vainqueurs. Il pourra paraître dur de dévoiler les torts d’un peuple à l’agonie; mais la justice de l’histoire exige qu’on ne garde pas le silence sur les fautes par lesquelles une nation aussi importante a provoqué elle-même sa ruine. L’aflligeante peinture de ses malheurs serait par trop pénible, si l’on ne regardait ces malheurs que comme l’oeuvre du hasard, et non comme la conséquence de fautes graves. Il est nécessaire que nous nous reportions quelque peu en arriére, pour bien comprendre comment les événements que nous avons à raconter ont pu être possibles.

Depuis des siècles, la Pologne supportait le fléau de la servitude. Les neuf dixièmes de ses habitants étaient des serfs qui, sans le moindre droit légal pour les protéger, se trouvaient en proie à la volonté arbitraire de leurs seigneurs. Là subsistait encore cette vieille loi en vertu de laquelle, en cas de meurtre, la vie humaine était estimée à dix marcs, ce qui, au cours de la monnaie d’alors, équivalait à & thalers (15 francs) (1). Le seigneur disposait selon son bon plaisir de la personne et des biens de ses serfs. A l’époque précisément où, dans toutes les autres nations, pénétrait le besoin de liberté personnelle et d’égalité civile, à la fin du xvu’ siècle, la tyrannie de la noblesse était portée à son comble en Pologne. Vers le milieu de ce siècle, les impôts et les charges dépassaient déjà toute mesure; les corvées en étaient venues à occuper les paysans quatre jours entiers par semaine, et la brutalité avec laquelle s’accomplissaient ces exactions était sans bornes. « Les gentilshommes, écrivait un voyageur en l’année 178J, abusent de toute jeune fille qui leur plaît, et ren(1) Stanislas Leczinski (ÛEM~’M~M.p/H&M. bienfaisant, in, 3), cité et commenté par Lelewel, 1I, 295.