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PROCÈS DE LOUIS XVf.

A la Convention, les haines s’étaient réveillées plus ardentes que jamais; a mesure que le moment de la décision approchait, un sentiment de justice succédait dans la majorité au fanatisme révolutionnaire, plutôt feint que réel d’ailleurs. Après s’être despotiquement constitués en juges, les membres de cette majorité voulaient au moins en remplir les fonctions avec une apparence de dignité. Ils voulaient donner un défenseur au roi, accorder à ce défenseur un libre accès auprès du prisonnier, permettre à tous deux l’examen des pièces, et, enfin, leur donner le temps nécessaire pour préparer leurs moyens de défense. La Gironde approuvait çà et la ces demandes, surtout lorsqu’il s’agissait de gagner du temps ou de combattre la Municipalité, tandis que les Jacobins rivalisaient de fureur et de rage pour forcer l’Assemblée à prononcer la condamnation le jour même, séance tenante, et sans différer d’une heure. Chacune des motions que nous venons d’indiquer provoqua une lutte orageuse, des soupçons réciproques, des apostrophes insultantes chacun des moyens légaux accordés d’habitude aux criminels vulgaires dut être arraché à force de lutte à la cruauté opiniâtre de la Montagne. Enfin, deux défenseurs, et plus tard même un troisième, furent accordés au roi on leur permit de conférer avec Louis XVI, et le 26 décembre fut fixé pour la défense.

Les jours s’écoulèrent jusque-là dans des tentatives continuelles faites par les différents partis pour affaiblir ou anéantir leurs adversaires avant le commencement du combat suprême. La Gironde se rattacha encore à la folle pensée que la Montagne ne poussait si ardemment à la mort de Louis XVI que pour servir Philippe-Égalité, et Buzot crut avoir fait une grande chose en obtenant le 16 un décret qui bannissait hors de France tous les princes de la maison de Bourbon. Rien ne put le détromper, pas même le fait de voir Robespierre et Saint-Just l’appuyer fortement; il résulta de cette motion que Marat et quelques Cordeliers, qui ne voulaient pas être privés de la bourse toujours accessible du duc d’Orléans, excitèrent une émeute effroyable dans les faubourgs, et obligèrent le 22 la Convention à ajourner le décret. Brissot, Jean Debry, Bréard, essayèrent le 2A, mais tout aussi vainement, d’apaiser les passions par une série de motions philanthropiques et démocratiques, telles que l’adoption des enfants pauvres par