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EN PRÉPARANT SES LIGNES

rayon plus chaud, une première mouche, le feront s’arrêter pensif, ou rechercher la compagnie d’un fervent de la ligne, pour entamer, sans se lasser jamais, le ressassage des éternelles histoires, qui bourrent, à le faire crever, le panier du pêcheur.

Écoutez-le songer tout haut, le soir, dans l’engourdissement béât d’une dernière pipe !

Oui, c’est bien vrai, le calendrier l’indique, dans un mois, dans une semaine, demain, la lune sera propice : un premier quartier. Avec le printemps que nous avons, la saison ne peut être que hâtive. Car il faut au pêcheur une raison plausible pour partir toujours un peu plus tôt, quitte à regretter, d’une année à l’autre, de n’avoir pu freiner son impatience.

Oui, dans un mois, je serai à mon endroit favori, la ligne en main, cheveux au vent, planté dans mes vieilles bottes, sur la grosse roche au pied de la chute grondante. Ce sera l’heure idéale ; le soleil vient à peine de se glisser derrière les pins de la montagne. Le vent tombe, une brise discrète ride à point les coins d’eau trop calme.

Je choisis dans mon livret une belle mouche neuve : noire en mai, bleue en juin ; puis une autre