Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/171

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C'est ce qu'on ne fait point par simple astrologie, [895]
Ces fantômes parlants ne vont que par Magie,
Dont la noire science étant sujette aux lois
D'un courage bien noble est rarement le choix ;
D'ailleurs, la vision est fort mélancolique
D'un esprit enfermé dans un corps fantastique, [900]
Cette apparition pleine d'horreur en soi
Fait pâlir bien souvent les plus hardis d'effroi,
Et vous y manqueriez sans doute de courage.

léonor

Non, non, de mon amant si ce spectre a l'image,
Dans cette vision, dans ce charme trompeur, [905]
J'aurai plus de plaisir que je n'aurai de peur.
Mais vous vous défiez peut-être d'une femme,
Et croyez qu'un secret soit mal sûr...

don fernand

Non, Madame,
Car je confesse enfin puisque vous m'en pressez,
Que pour vous obéir j'en sais peut-être assez, [910]
Et si j'ai dit d'abord qu'il m'était impossible
C'est parce que j'y trouve un obstacle invincible ;
Vous m'avez dit qu'en Flandre est cet amant heureux,
Ainsi je ne puis rien, la mer est entre-deux,
Cet élément sauvage à mes charmes s'oppose, [915]
Et fait de mon refus la vraie et seule cause.

léonor

Cet obstacle de mer est facile à lever,
Car de longtemps en Flandre il ne peut arriver,
Puisque depuis huit jours ayant quitté la ville
À Saragosse encor sa présence est utile, [920]
Un procès l'y retient.

don fernand

à Philipin
À ce coup m'y voici.

philipin

à Don Fernand
Chacun croit depuis peu Don Juan parti d'ici.
Si c'était lui, Monsieur ?

don fernand

à Philipin