Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/357

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Oronte, seul.

La remontrance est belle et l’avis important.
Combien de visions accompagnent cet âge !


Scène V

ORONTE, LISETTE.

Lisette

St, st, mon Cavalier, tournez un peu visage.

Oronte

Qui m’appelle ?

Lisette

C’est moi ; ne me voyez-vous pas ?

Oronte

Un nuage importun me cache vos appas,
Et pour moi cette coiffe est un supplice extrême.
Est-ce ainsi que l’on doit agir lorsque l’on s’aime ?

Lisette

Le compliment est doux, et c’est bien débuter.
Nous nous aimons l’un l’autre ?

Oronte

Il n’en faut point douter.

Lisette

Et bien, je le crois donc puisque vous me le dites.
C’est réciproquement l’effet de nos mérites,
Mais j’avois jusqu’ici vécu sans le savoir.

Oronte

Je suis moi-même encor à m’en apercevoir,
Mais on tient que l’Amour par sa toute-puissance
Se glisse dans nos cœurs sans que même on y pense.
Et si cette maxime est valable, en ce cas
Nous pouvons nous aimer, et ne le savoir pas.

Lisette

Vous ne manquez jamais à trouver vos défaites.
Ce n’est pas d’aujourd’hui que je sais qui vous êtes,