Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/389

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Oronte

C’est aimer à peu près comme il faut que l’on aime.

Cliton

Aussi commence-t-on à vous aimer de même

Oronte

Je ne m’en fâche point.

Cliton

À vous parler sans fard,
Je crois que votre amour est quelque amour bâtard.

Oronte

Il est vrai que sur lui je garde assez d’empire.

Cliton

Plus je vous examine, et plus je vous admire.
Tantôt l’œil vif et gai vous faites le Galant,
Tantôt morne et pensif vous faites le dolent ;
Ici l’air enjoué vous contez des merveilles,
Là de soupirs aigus vous percer les oreilles,
Je m’y laisse duper moi-même assez souvent,
Vous pleurez, vous riez, et tout cela du vent.
Quels tours de passe-passe !

Oronte

Et mon humeur t’étonne ?

Cliton

Je n’en connu jamais de si Caméléonne,
Chaque objet lui fait prendre un jeu tout différent.

Oronte

C’est ainsi que l’amour jamais ne me surprend,
Je le brave, et par là rendant ses ruses vaines,
J’en goûte les douceurs sans en sentir les peines.

Cliton

Quoi, donner tout ensemble et reprendre son cœur,
C’est amour ?

Oronte

C’est amour, Cliton, et du meilleur.

Cliton

Mais l’Amour, n’est-ce pas une ardeur inquiète,
(Car si j’y suis Grec depuis que j’en tiens pour Lisette.)