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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 1, 1748.djvu/405

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Enfin moi qui m’abaisse à t’aimer…

Cliton

Enfin toi
Qui rends ma bourse nette, et te moques de moi.

Lisette

C’est aussi par tes dons qu’on me voit si poupine.

Cliton

Diable je t’appréhende, et ta chienne de mine.
À présent devant moi tu prends des libertés
Qui refroidissent bien mes libéralités,
Chacun t’en vient conter.

Lisette

Oui, mais pour des paroles,
Sans rien donner de plus, j’attrape des pistoles.

Cliton

Et par cette raison je m’en dois consoler ?

Lisette

Cliton, parlons François au lieu de se quereller.
Tu connois mon humeur, tu connois ma méthode,
J’aime à changer d’habits, j’aime à suivre la mode,
J’achète tous les jours quelque meuble nouveau,
Je fais couper, tailler, et toujours du plus beau.
Tantôt cher le Mercier, tantôt chez la Lingère,
Et tant que j’ai de quoi je ne l’épargne guère.
Vois-tu bien ? Cela coûte, et tant d’ajustement
Ne se fait ni par sort ni par enchantement.
Tes gages, quels qu’ils soient, à peine sont capables
De me fournir de gants et de nippes semblables,
Et si je ne souffrois qu’on m’en contât un peu,
Je viendrois au rabois, ou je jouerois beau jeu.

Cliton

C’est bien fait, mais viens ça, dis-moi quels avantages
Jusqu’ici j’ai trouvés à te donner mes gages.
Pour toi de jour en jour ma passion s’accroît,
Et je ne t’ose encor toucher le bout du doigt.

Lisette

Ne suffit-il pas de savoir que je t’aime ?