Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/233

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CLÉOMÈNE.

Ah, madame !…

ERIPHILE.

Parlez : si c’est ce qui vous mène,
Je vous dois audience aussi bien que la reine.

CLÉOMÈNE.

Pour me faire jouir de toute sa douceur,
Daignez me la promettre avecque moins d’aigreur,
Ma princesse.

ERIPHILE.

Est-ce à moi que ce discours s’adresse ?
Qui peut trahir Argos me nomme sa princesse,
Et lorsque de ses vœux notre honte est l’objet,
Me nommant sa princesse, il se dit mon sujet !
Si l’indignation d’un conseil bas et lâche
Me fait vous témoigner quelque aigreur qui vous fâche,
Jugez contre un sujet quel seroit mon courroux
Par le peu d’intérêt que je dois prendre en vous.

CLÉOMÈNE.

Et j’ai pu m’attirer un traitement semblable
Par le plus bel effort dont l’amour soit capable ?
Car j’atteste les dieux…

ERIPHILE.

Non, non, c’est perdre temps !
Une excuse de vous n’est pas ce que j’attends,
Et quand mon cœur pourroit s’en pardonner l’injure,
Quelle foi donnerois-je aux serments d’un parjure ?

CLÉOMÈNE.

Moi, parjure, madame ! Et d’un soupçon si bas
Vos propres sentiments ne me défendent pas ?
Ah, si de mes respects désavouant l’hommage
Ma foi d’un tel reproche a mérité l’outrage…

ERIPHILE.

En effet, c’est fort bien signaler votre foi
Que servir Timocrate aujourd’hui contre moi !
Son hymen conseillé d’injustice m’accuse ?
Ingrat, voilà ton crime : apprête ton excuse,