Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 2, 1748.djvu/299

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C’est par votre ordre seul qu’une secrète flamme
Au mérite du Prince ouvrit toute mon âme,
Et la rendit sensible à ces impressions
Que sont sur les grands cœurs les belles passions.
Par ce fatal arrêt d’un destin trop contraire
Il en faut effacer l’aimable caractère,
Il faut à sa malice immoler un beau feu,
Il faut reprendre un cœur donné par votre aveu.
Il le faut, j’y consens ; mais à quoi qu’il s’apprête,
Ce cœur garde toujours l’orgueil de sa conquête,
Et dans cette fierté qui l’ose accompagner,
Auprès de ce qu’il perd voit tout à dédaigner.

ARAXE

Ô nobles sentiments d’une âme peu commune,
Qui même en lui cédant sait braver la Fortune !
Quoi que pour ta vertu le Ciel veuille ordonner,
C’est le moins qu’il lui doit que de la couronner.
Il t’en répond par moi ; suis l’amour qui t’engage,
Quoi qu’il puisse arriver le trône est ton partage.
Crois-en ce noble orgueil qui pouvant tout sur toi
N’a pu se relâcher que pour le fils d’un Roi.
Le Prince est généreux ; continue, espère, aime ;
Je connois mieux ton sang que tu ne fais toi-même,
J’en vois jusqu’à la source, et j’y sais pénétrer
Ce qu’à tes yeux le ciel refuse de montrer.


Scène III

Bérénice, Clitie.
CLITIE

Il vous promet beaucoup.

BÉRÉNICE

Ah, Clitie, il est père,
Et le sang l’abandonne à tout ce qu’il espère ;