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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 3, 1748.djvu/15

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GUZMAN.

Ma foi, c’est un brave homme, & j’en suis satisfait ;
La station est douce, on y boit d’importance.

D. FERNAND.

Il m’attend comme gendre ?

GUZMAN.

Il m’attend comme gendre ?Avec impatience,
Et trouve tout en vous tellement à son gré,
Qu’il voudroit dès demain vous avoir engendré.
Votre retardement le tient bien en cervelle.

D. FERNAND.

Par toi de mon départ il a sû la nouvelle ?

GUZMAN.

Il sait jusqu’au sujet qui vous l’a fait hâter.

D. FERNAND.

Sa fille, tu l’as vûe, il n’en faut point douter ?

GUZMAN.

Arrivé d’hier au soir, je n’ai vû que le pere,
Et ne sachant sans vous que résoudre ni faire,
Sorti sans en rien dire avant qu’il fût levé,
J’ai voulu voir la ville, & je vous ai trouvé.
Mais de grace, Monsieur, quelle rare aventure
Vous fait fuir le beau-pere, & l’épouse future ?
Vous sentez-vous impropre au matrimonium ?

D. FERNAND.

Guzman, je laisse agir mon inclination,
Et si de doux objets ont tenté ma franchise…

GUZMAN.

Prenez garde, Monsieur, à cette marchandise.
L’air de Cour rabat bien du haut prix qui s’y met,
On ne la livre pas telle qu’on l’y promet,
Et beaucoup attrapés par un maintien modeste,
Pensent prendre en plein drap, qui n’achetent qu’un reste.

D. FERNAND.

Non, non, mon cœur n’est point novice dans ce choix,
Et pour deux aujourd’hui brûle tout à la fois.