Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/433

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J’aurois péri pourtant ; aussi bien ces cœurs bas
N’ayant pu me gagner, ne m’épargneront pas,
Ils ont soif de mon sang, et l’ont trop fait entendre ;
Mais j’ai cru qu’à vos yeux je devois le répandre,
Et marquer à ma Reine, en renonçant au jour,
Combien je sens les maux qu’a causés mon amour.

AMALASONTE.

Il n’en faut point douter, le trône a ses amorces,
J’ai trop à Théodat fait connoître ses forces.
Sûr de l’appui du Peuple, il a vu que sans moi,
Sans me donner la main, il pouvoit être roi,
Et ne pouvant douter qu’avec le diadème
Il ne parût aimable aux yeux de ce qu’il aime,
Quoi que pour votre hymen il m’ait pu demander,
Prêt à perdre Ildegonde, il n’a pu la céder.
L’arrêt de mon exil n’a plus rien qui m’étonne ;
Pour la faire régner, c’est l’amour qui le donne.
Theudis et Trasimond auroient-ils aujourd’hui
Osé parler si haut, s’ils n’étoient sûrs de lui ?
De ses complots par là je vois la certitude.
Mais quand le Ciel me livre à son ingratitude,
Assemblant ce que j’ai de fidèles sujets,
Faites leur pénétrer ses coupables projets.
Parlez, essayez tout. Souvent un foible obstacle
Fait ce qu’on auroit cru ne pouvoir sans miracles ;
Du moins, forcés à voir mon ennemi régner,
Si j’obtiens quelque temps, je croirai tout gagner.


Scène V


Amalasonte, Gepilde.

AMALASONTE.

Est-il une infortune à ma disgrâce égale,
Gepilde ? Il faudra voir triompher ma rivale.