Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/471

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

À démentir mes yeux sur une trahison,
Où mon cœur refusoit de croire ma raison.
Oui, pour vous contre moi ma tendresse séduite,
Quoi qu’on pût m’opposer, excusoit votre fuite.
Cent soupçons qui pouvoient alarmer mon amour,
Avaient beau contre vous me parler chaque jour,
À vous justifier toujours trop favorable,
J’en rejetois la voix qui vous rendoit coupable,
Et je ne regardois dans ce trouble odieux,
Que ce qui vous peignoit innocent à mes yeux.
Mais un accueil si froid et si plein de surprise,
M’apprend trop ce qu’il faut que pour vous je me dise.
Je n’ai plus à douter qu’un honteux repentir
Ne vous ait sans rien dire obligé de partir.
J’en veux pourtant, j’en veux, dans mon malheur extrême,
Entendre les raisons de votre bouche même.
Parlez donc, et sachons par où j’ai mérité,
Ce qu’ose contre moi votre infidélité.

Dom Juan

Si mon éloignement m’a fait croire infidèle,
J’ai mes raisons, Madame, et voilà Sganarelle,
Qui vous dira pourquoi…

Sganarelle

Je le dirai ? Fort bien.

Dom Juan

Il sait…

Sganarelle

Moi ? S’il vous plaît, Monsieur je ne sais rien.

Elvire

Et bien, qu’il parle ; il faut souffrir tout pour vous plaire.

Dom Juan

Allons, parle à Madame, il ne faut point se taire.

Sganarelle

Vous vous moquez, Monsieur.

Elvire, à Sganarelle.

Puisqu’on le veut ainsi,
Approchez, et voyons ce mystère éclairci.