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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 4, 1748.djvu/552

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Le prenant pour garant du soin de sa querelle,
J’appuierai de mon cœur la malice infidèle.
Et selon qu’on m’aura plus ou moins respecté,
Je damnerai les Gens de mon autorité.
C’est ainsi que l’on peut, dans le siècle où nous sommes,
Profiter sagement des foiblesses des Hommes,
Et qu’un esprit bien fait, s’il craint les Mécontents,
Se doit accommoder aux vices de son temps.

Sganarelle

Qu’entends-je ? C’en est fait, Monsieur, et je le quitte,
Il ne vous manquoit plus que vous faire Hypocrite,
Vous êtes de tout point achevé, je le voi.
Assommez-moi de coups, percez-moi, tuez-moi,
Il faut que je vous parle, il faut que je vous dise,
Tant va la cruche à l’eau qu’enfin elle se brise ;
Et comme dit fort bien en moindre ou pareil cas,
Un auteur renommé que je ne connois pas,
Un oiseau sur la branche est proprement l’exemple
De l’Homme qu’en Pécheur ici-bas je contemple.
La branche est attachée à l’arbre, qui produit,
Selon qu’il est planté, de bon ou mauvais fruit.
Le Fruit, s’il est mauvais, nuit plus qu’il ne profite ;
Ce qui nuit, vers la mort nous fait aller plus vite ;
La mort est une loi d’un usage important.
Qui peut vivre sans loi, vit en brute ; et partant
Ramassez, ce sont-là preuves indubitables,
Qui font que vous irez, Monsieur, à tous les Diables.

Dom Juan

Le beau raisonnement !

Sganarelle

Ne vous rendez donc pas,
Soyez damné tout seul, car pour moi je suis las…

Dom Juan, apercevant Léonor.

N’avois-je pas raison ? Regarde, Sganarelle.
Vient-on au rendez-vous.