Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/120

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Et si ma sœur savoit tout ce qui s’en publie…

D. Fernand.

Qu’elle n’en sache rien, mon fils, je vous en prie.
Son cœur a déjà pris je ne sais quels dégoûts
Pour celui que mon choix lui donne pour époux ;
Ils pourroient s’augmenter en lui parlant d’un autre.

D. César.

Je dois soumettre ici mon sentiment au vôtre ;
Mais si le mariage est souvent sans douceur,
Vous hazardez beaucoup en contraignant ma sœur ;
Le désordre est à craindre où l’époux ne peut plaire.

D. Fernand.

Je sai ce qu’il lui faut, qu’elle me laisse faire.
Si mon gendre n’est pas tout-à fait-sérieux,
S’il a l’humeur trop gaie, il n’en vaudra que mieux.
Les choses sont au point qu’on ne s’en peut défendre.
J’ai donné ma parole, & ne puis la reprendre.
C’est sur quoi je voulois vous parler en secret.
Vous avez l’esprit doux, insinuant, discret,
Conférez avec elle ; & sur cet hyménée
Dites-lui ce que doit une fille bien née,
Elle vous en croira.

D. César.

Elle vous en croira.Reposez-vous sur moi.
J’appuierai vos desseins autant que je le dois,
Et n’épargnerai rien pour vous faire connoître,
Qu’aimé par vous en fils, je mérite de l’être.

D. Fernand.

C’est là ce que mon cœur du vôtre s’est promis.
Cependant il nous faut assembler vos amis.
Ah, qu’en vous embrassant Dom Sanche aura de joie !
Dom Pedre…

D. César.

D. Pedre…Il ne faut pas encor que je les voie,
À moins qu’on prenne soin de m’en entretenir,
À peine de leurs noms puis-je me souvenir ;
Et je crois qu’il seroit à propos pour ma gloire
De cacher quelque temps ma perte de mémoire.