Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/244

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palémon

Sans Silla qu’il attend, je pense
Qu’ici l’on auroit beau le vouloir arrêter.
Comme il sait qu’elle vient, il se fait une joie
De pouvoir lui montrer qu’il dédaigne Circé.
Souvent, pour voir son feu récompensé,
Un pareil sacrifice est une sûre voie.

astérie

J’ai peur qu’il ne s’en trouve mal.
Circé n’est pas d’humeur à souffrir qu’on l’outrage ;
Il n’es faut pour témoin que ce pauvre animal,
Dont, si pour moi l’amour t’engage,
Tu vas devenir le rival.

  
On voit paroître un singe.

 

palémon

Le rival d’un singe ? Ah, crois que…

astérie

Sans colère.
C’est seulement depuis un mois,
Que d’Homme il est ce que tu vois ;
Pour son malheur je lui fus chère,
Circé l’aimoit, il lui cacha son choix,
Et feignant, il sut si bien faire,
Qu’il sembloit vivre sous ses lois,
Tandis que tous ses vœux n’aspiroient qu’à me plaire.
C’étoit le plus badin Amant
Qui jamais ait été capable de tendresse.
Il me parloit des yeux sans cesse,
S’il ne le pouvoit autrement ;
Mais enfin malheureusement
De ses soins affectés Circé connut l’adresse,
Et le fit Singe en un moment.
Même destinée à deux Pages
Qu’au Palais parmi nous il avoit amenés.
Les voici. Tous les trois par mille badinages
Semblent se tenir fortunés
De venir chaque jour me rendre leurs hommages.