Et le coup malheureux qui causa son trépas
Fut un crime du Sort, et non pas de mon bras.
Polixène oubliant cette triste victoire,
Ne voudra regarder que l’amas de ma gloire,
De son cœur tant d’éclat viendra sans peine à bout,
Et pour le mériter le nom d’Achille est tout.
Ce nom est au dessus de tout ce qu’on peut dire,
Mais on peut n’aimer pas toujours ce qu’on admire,
Et le cœur fier de soi se rend moins aisément
Aux vertus d’un héros, qu’aux soupirs d’un Amant.
Du succès de mon feu je ne suis point en peine,
J’en ai trop consulté les yeux de Polixène,
Pour moi, quand je m’approche, ils ont tant de douceur,
Que leur tranquillité me répond de son cœur,
C’est un entier oubli de ce qu’on m’a vu faire,
Point de marques d’aigreur pour la mort de son frère.
Le triomphe secret de m’avoir adouci
lui fait naître…
Seigneur, Briseis vient ici.
Cache-lui mon secret, elle pourra l’apprendre
Du bruit qui dans le camp doit bientôt s’en répandre,
Quand j’aurai vu Priam, il faudra m’exposer
À ce que sa douleur lui pourra faire oser.