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Page:T. Corneille - Poèmes dramatiques, tome 5, 1748.djvu/535

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ACTE II.



Scène I.

ROGER, MARPHISE.
Roger.

Oui, ma sœur, dans ses yeux j’ai vu toute la joie
Qu’à revoir un amant un tendre cœur déploie.
Sa surprise mêlée à ses ravissemens,
Donnoit à sa beauté de nouveaux agrémens ;
Et depuis que sa foi me répond de sa flamme,
Jamais transport si doux n’avoit saisi son ame.
Il a fallu d’abord lui conter quel destin
M’avoit de son absence augmenté le chagrin.
Mon départ, de Léon rendoit la mort certaine ;
Et, lorsqu’elle a connu que contraire à ma haine,
Par d’imprévûs retours le ciel avoit permis
Qu’après nous être vus nous devinssions amis…

Marphise.

Vous, ami de Léon ? Quelle humeur inconstante…

Roger.

Vous m’allez condamner comme a fait Bradamante ;
Mais quand j’aime Léon, au lieu de me blâmer,
Voyez si je me puis défendre de l’aimer.

Marphise.

En vain cette amitié vous paroît excusable.
Par où Léon pour vous en sera-t-il capable ?
C’est vous, comme rival, qui causez ses ennuis,
C’est vous…

Roger.

C’est vous…Léon ignore encore qui je suis.