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TABLEAU DU LA FRANCE


lequel elle s’approche de la Seine, jusqu’à la sérieuse Orléans, ville de légistes au moyen âge, puis calviniste, puis janséniste, aujourd’hui industrielle. Mais je parlerai plus tard du centre de la France ; il me tarde de pousser au midi ; j’ai parlé des Celtes de Bretagne, je veux m’acheminer vers les Ibères, vers les Pyrénées.

Le Poitou, que nous trouvons de l’autre côté de la Loire, en face de la Bretagne et de l’Anjou, est un pays formé d’éléments très-divers, mais non point mélangés. Trois populations fort distinctes y occupent trois bandes de terrains qui s’étendent du nord au midi. De là les contradictions apparentes qu’offre l’histoire de cette province. Le Poitou est le centre du calvinisme au XVIe siècle, il recrute les armées de Coligny, et tente la fondation d’une république protestante ; et c’est du Poitou qu’est sortie de nos jours l’opposition catholique et royaliste de la Vendée. La première époque appartient surtout aux hommes de la côte ; la seconde, surtout, au Bocage vendéen. Toutefois l’une et l’autre se rapportent à un même principe, dont le calvinisme républicain, dont le royalisme catholique n’ont été que la forme : esprit indomptable d’opposition au gouvernement central.

Le Poitou est la bataille du Midi et du Nord. C’est près de Poitiers que Clovis a défait les Goths, que Charles-Martel a repoussé les Sarrasins, que l’armée anglo-gasconne du prince Noir a pris le roi Jean. Mêlé de droit romain et de droit coutumier, donnant ses légistes au Nord, ses troubadours au Midi, le Poitou est lui-même comme sa Mélusine[1], assemblage de natures diverses, moitié femme et moitié serpent. C’est dans le pays du mélange, dans le pays des mulets et des vipères[2], que ce mythe étrange a dû naître.

  1. Voy. les Éclaircissements.
  2. App., 9