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de grilles si chers aux anglais — it looks so chearful — disait-on ; lorsqu’un jour, sans que rien put faire présager le moindre inconvénient, une des malades les plus paisibles, fille d’un homme politique très en vue, alla se précipiter dans le feu de l’une des cheminées et s’y brûla de telle sorte qu’elle en mourut en peu de temps : c’était évidemment de sa part un acte auquel elle fut poussée par une hallucination soudaine, causée par la contemplation même de ce feu si gai. La nouvelle de cet accident fut le signal d’une véritable guerre menée contre les médecins et les employés de l’asile, et la prétendue opinion publique, se prit à trouver horribles dans un asile ces open fires que, quelques jours auparavant, on déclarait si réjouissants. Les administrateurs de l’institution furent exonérés, comme de juste, de tout blâme, par les inspecteurs et par les autorités, qui, heureusement, résistèrent à la persécution que certaines gens voulaient leur faire subir ; mais il reste la question de savoir s’il est mieux d’avoir des feux de cheminées ou de n’en pas avoir dans les asiles et, quand on se décide à en avoir, s’il est préférable de n’y mettre aucune précaution, ou mieux de les entourer d’un grillage protecteur ? Les partisans de la non-restraint ne veulent pas de grillages ; ils tiennent absolument à l’idée de faire prendre leurs asiles de fous, pour des maisons de gens bien sages et bien gentils au fond, quoique parfois enclins à montrer un peu d’excentricité, ou de mauvaise humeur. Ceux qui ne croient pas devoir essayer de cacher le véritable caractère des asiles d’aliénés préfèrent ou n’avoir point de feux de chemines, ou leur mettre des grillages protecteurs, et je me sens heureux et en tranquillité de conscience d’être du nombre de ces derniers. Toutes ces questions doivent être laissées aux médecins chargés du traitement des aliénés, et aux administrateurs des asiles. Mais, dira-t-on peut-être, les médecins diffèrent et il y en a qui ne sont pas eux-mêmes tout à fait exempts d’idées extravagantes : ce serait le cas alors de se demander — Quid custodem custodiat ? — Sérieux embarras, que nous n’avons pas encore ressenti en Canada, que je sache, et que, je l’espère, M. le Dr Tuke ne réussira pas à nous léguer.

Je trouve, dans un Rapport des Commissaires du « Central Kentucky Asylum » du 3 octobre 1882, sur ce sujet