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Page:Tachard - Voyage de Siam, des Pères jésuites, 1686.djvu/126

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VOYAGE

Quelque bonne opinion qu’ils ayent d’eux-mêmes, ils ménent une vie misérable. Ils ſont mal propres juſques à l’excez, & il ſemble qu’ils s’appliquent à ſe rendre affreux. Quand ils veulent ſe parer, ils ſe frottent la tête, le visage & les mains de la ſuye de leurs chaudières, & quand ils n’en ont pas, ils ont recours à une certaine graiſſe noire, qui les rend ſi puants & ſi hideux, qu’on ne les peut ſouffrir. Delà vient que leurs cheveux, qui d’ailleurs ſont naturellement preſque auſſi cotonnez que ceux des Négres, se réduiſent en pétites boulles, auſquelles ils attachent des piéces de cuivre ou de verre. Les plus conſidérables parmy eux ajoûtent à ces ornemens de grands cercles d’yvoire qu’ils paſſent dans leurs bras au deſſus & au deſſous du coude. Leur nourriture eſt encore plus ſurprenante : ils ſe font un mets délicieux de la vermine qui s’engendre dans les peaux dont ils ſont revêtus. Nous l’avons vû plus d’une fois ; ſans cela nous n’euſſions jamais pû le croire. Les femmes, outre cet habit, s’entourent les jambes d’inteſtins d’animaux ou de petites peaux qu’elles taillent pour cet uſage : elles le font pour ſe garantir des piqueures d’épines quand elles vont dans les bois, & pour avoir un remede toûjours preſt contre la

Les vêtemens des hommes & des femmes.