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Page:Tachard - Voyage de Siam, des Pères jésuites, 1686.djvu/250

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VOYAGE

mil ſix cens ſoixante, n’étant âgé que de douze ans, il eût aſſez de diſcernement pour connoître le mauvais état où ſes parens avoient mis les affaires de sa Maiſon. Cet­te veuë luy fit prendre une reſolution qu’on n’euſt pas dû attendre d’un enfant de cet âge. Ne pouvant ſoûtenir ſa qualité dans ſon païs, il s’embarqua avec un Capitaine Anglois qui retournoit en Angleterre. Son eſprit, ſa vivacité, ſon humeur accommo­dante, & ſes manieres agréables le firent bien-tôt connoître, & luy attirerent la bienveillance de quelques Seigneurs de la Cour ; mais déſeſpérant d’y réüſſir, il ſe mit ſur mer dans le deſſein de paſſer aux In­des. Il avoit en tête de s’avancer. Son gé­nie luy donnoit des ouvertures pour ſa for­tune, & s’il eût eu moins de probité, il en eut fait une conſidérable en peu de tems. Mais il aima mieux paſſer par tous les dégrez de la Marine, & s’élever peu à peu avec honneur, que de s’enrichir tout d’un coup par des voyes peu légitimes.

Ayant demeuré quelques années à Siam, & amaſſé un peu de bien, il réſolut de quitter le ſervice de la Compagnie d’Angleterre, d’avoir un Vaiſſeau à luy, & de négocier de ſon chef. Il eut de la peine à ſortir de Siam, retenu par ſes amis, & par ſes effets qu’il