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Page:Tachard - Voyage de Siam, des Pères jésuites, 1686.djvu/379

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DE SIAM. Livre V.

mais que je suis extrémement fâché que le Roy de France mon bon amy me propoſe une chose ſi difficile, & dont je n’ay pas la moindre connoiſſance ; que je me rapporte moy-même à la ſageſſe du Roy tres-Chrétien, afin qu’il juge de l’importance & de la difficulté qui ſe rencontre dans une affaire auſſi délicate que l’eſt le changement d’une Religion receuë & ſuivie dans tout mon Royaume ſans diſcontinuation depuis deux mille deux cens vingt-neuf ans.

Motifs qui retiennent le Roy de Siam dans sa Réligion.

Au reſte je m’étonne que le Roy de France mon bon ami s’interreſſe ſi fort dans une affaire qui regarde Dieu, où il ſemble que Dieu même ne prenne aucun intereſt, & qu’il a entiérement laiſſée à nôtre diſcretion. Car ce vray Dieu qui a créé le Ciel & la Terre & toutes les créatures qu’on y voit, & qui leur a donné des natures & des inclinations ſi différentes, ne pouvoit-il pas, s’il eût voulu, en donnant aux hommes des corps & des ames ſemblables, leur inſpirer les mêmes ſentimens pour la Religion qu’il faloit ſuivre, & pour le culte qui luy étoit le plus agréable, & faire naître toutes les Nations dans une même Loy. Cet ordre parmi les hommes & cette unité de Religion dépendant abſolument de la Providence divine, qui pouvoit auſſi aiſément l’introduire

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