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Page:Tachard - Voyage de Siam, des Pères jésuites, 1686.djvu/386

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VOYAGE

peut s’imaginer. Toutes ces grandes qualitez luy attirent la conſidération de ſes voiſins, la crainte de ſes ennemis, l’eſtime de ſes ſujets & un reſpect qui va juſques à l’adoration. Il n’a jamais été ſujet aux vices ſi ordinaires parmy les Princes d’Orient, il a même fait punir avec beaucoup de ſévérité les principaux Mandarins & les premiers Officiers de la Couronne pour avoir été trop attachez à leurs plaiſirs. Ainſi on ne trouve point en luy l’obſtacle le plus invincible à la converſion des Princes Idolâtres, je veux dire la l’amour déréglé des femmes.

Par la force de ſon esprit il a découvert la fauſſeté de la Religion de ses Anceſtres, & il ne croit point un Dieu anéanti, ſelon l’opinion populaire, ou comme diſent quelques uns de leurs Docteurs, un Dieu, qui las de gouverner le Ciel, ſe plonge dans le repos & s’enſevelir pour jamais dans l’oubli de tout ce qui ſe paſſe au monde, ny mille autres superſtitions prêchées par les Talapoins, qui sont les Prêtres & les Prédicateurs du Royaume. Au contraire il croit que Dieu eſt éternel, que ſa Providençe veille inceſſamment au gouvernement du monde, & qu’elle ménage toutes choſes. C’eſt à ce même Dieu immortel qu’il fait ſouvent des Priéres & dont il