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Page:Tachard - Voyage de Siam, des Pères jésuites, 1686.djvu/64

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VOYAGE

dent ſur eux, quand ils ſortent hors de l’eau pour ſe ſauver des Bonites.

Un de ces poiſſons ſe trouvant un jour pourſuivy de prés ſauta dans nôtre Navire & donna dans la tête d’un Pilote. Quoyque j’en euſſe vû autrefois je pris plaiſir à le conſiderer, il étoit de la figure, de la couleur & de la groſſeur d’un Harang, le dos un peu plus épais & le devant de la tête arrondi comme le Rouget avec des ailes au deſſus des oüyes fort ſemblables à celles des Chauve-ſouris.

Voilà à peu prés ce que nous avons vû de poiſſons aux environs de la ligne. Nous avions eu le ſoleil à pic (c’eſt-à dire directement ſur la tête) dés le vingt-neuſiéme Mars vers le troiſiéme degré de latitude Nord.

Comme le Ciel fut fort ſerain ce jour-là ; nous eûmes le plaiſir de remarquer qu’à midy les mâts de tout ce qui étoit droit dans la Vaiſſeau ne faisoit nulle ombre. Depuis ce tems-là nous eûmes ſept ou huit jours de calme ; & nous ne fîmes les ſoixante & dix lieuës qui nous reſtoient juſques à la ligne que par grains[1], c’eſt-à-dire, avec des vents de peu de durée, qu’aménent avec eux les nuës & les orages. Aprés tout nous n’avons pas

  1. Un grain en terme de Marine ſignifie un vent violent, de peu de durée & accompagné de pluye.