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Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/174

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mirent dans le plus grand jour. Aussi de tous les écrivains qui, en haine de Tibère, ont recherché et grossi tous ses torts, pas un n’a chargé sa mémoire de ce trait odieux. J’ai voulu le rapporter et le combattre, afin de confondre, par un exemple éclatant, les traditions mensongères, et d’engager ceux dans les mains de qui tombera ce fruit de mon travail à ne point préférer des récits incroyables, avidement reçus par la multitude, à des faits réels, et que n’a point altérés l’amour du merveilleux.

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Tibère prononça du haut de la tribune un éloge de son fils, que le sénat et le peuple accueillirent avec les démonstrations de la douleur plutôt qu’avec une émotion véritable. On pensait à Germanicus, et l’on voyait avec une joie secrète se relever sa maison. Mais cette popularité naissante et les espérances trop peu déguisées de sa veuve Agrippine en hâtèrent la chute. Quand Séjan vit que la mort de Drusus n’était ni vengée sur ses assassins ni pleurée des Romains, emporté par l’audace du crime et l’ivresse d’un premier succès, il ne songea plus qu’aux moyens de détruire les enfants de Germanicus, qui devaient naturellement succéder à l’empire. On ne pouvait leur donner à tous trois du poison ; la fidélité de leurs gouverneurs et la vertu de leur mère formaient autour d’eux un impénétrable rempart. Il prend le parti d’accuser de révolte la fierté d’Agrippine ; il arme contre elle la haine invétérée d’Augusta et les nouveaux intérêts de sa complice Livie, afin que toutes deux la dénoncent au prince comme une femme orgueilleuse de sa fécondité, appuyée sur la faveur populaire, et insatiable de domination. Il employait en outre d’adroits calomniateurs, au nombre desquels il avait choisi, comme l’instrument le plus propre à ses desseins, Julius Postumus, amant de Mutilie, et devenu par ce commerce adultère un des familiers d’Augusta, auprès de laquelle Mutilie était toute puissante. Alarmant ainsi la vieillesse d’une femme jalouse de son pouvoir, il rendait l’aïeule intraitable pour sa bru. L’intrigue trouvait même auprès d’Agrippine des complices, dont les perfides suggestions exaspéraient de son côté ce caractère altier.

Affaires provinciales

Prières des alliés

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Cependant Tibère, sans interrompre un instant ses travaux accoutumés, et cherchant sa consolation dans les soins de l’empire, réglait les droits des citoyens, écoutait les prières des alliés. Les villes de Cibyre9 en Asie, d’Égium en Achaïe10