Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/192

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Philippe de Macédoine le leur avait enlevé, dans une guerre, par la force des armes ; mais qu’une décision de Jules César et d’Antoine les en avait remis en possession. Les Messéniens, de leur côté, faisaient valoir un ancien partage du Péloponnèse entre les descendants d’Hercule. Selon eux, "le champ de Denthélie, où est ce temple, était échu à leur roi ; et d’antiques inscriptions, gravées sur la pierre et sur l’airain, attestaient encore ce fait. S’il fallait invoquer le témoignage de l’histoire et de la poésie, des monuments plus nombreux et plus authentiques déposaient pour eux. La décision de Philippe était un acte de sa justice et non de son pouvoir : le roi Antigone, le général romain Mummius, avaient prononcé comme lui ; les Milésiens, pris pour arbitres, et en dernier lieu Atidius Géminus, préteur d’Achaïe, avaient confirmé cet arrêt." On jugea en faveur des Messéniens. Le temple de Vénus, sur le mont Éryx, était tombé de vétusté. Les Ségestains demandèrent qu’on le rebâtît, rappelant, sur son origine, ce que les traditions connues ont de flatteur pour le prince. Tibère se chargea volontiers de ce soin, comme d’un devoir de famille. On s’occupa ensuite d’une requête des Marseillais, et le précédent de P. Rutilius fut l’autorité qui décida la réponse. Banni par les lois, Rutilius avait reçu le droit de cité chez les Smyrnéens ; et c’est à son imitation que Vulcatius Moschus, exilé comme lui et devenu citoyen de Marseille, avait légué ses biens à sa nouvelle patrie.

25. Il y avait, sur les confins de la Laconie et de la Messénie, au bourg de Limnae (en grec = les marais), un temple de Diane, où les deux pays offraient en commun des sacrifices. Telle est l’origine du surnom de Limnatide donné à cette déesse.

Deux décès

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Dette année moururent deux hommes d’un haut rang, Cn. Lentulus et L. Domitius. Honoré du consulat et des décorations triomphales, méritées en combattant les Gétules, Lentulus eut encore une autre gloire : après avoir soutenu la pauvreté sans bassesse, il jouit sans orgueil d’une grande fortune légitimement acquise. Domitius brillait de l’éclat de son père, qui fut maître de la mer dans la guerre civile, jusqu’à ce qu’il se joignît au parti d’Antoine, puis enfin à celui de César. Son aïeul périt à la bataille de Pharsale, pour la cause des grands. Lui-même fut choisi pour être l’époux de la jeune Antonia, fille d’Octavie. À la tête d’une armée, il passa l’Elbe et pénétra dans la Germanie plus avant qu’aucun de ses prédécesseurs : succès qui lui valurent les ornements du triomphe. Dans ce temps mourut aussi L. Antonius, héritier d’un nom illustre, mais malheureux. Il était très jeune lorsque son père Julus Antonius fut puni de mort pour son commerce adultère avec Julie ; et Auguste envoya cet enfant, petit-fils de sa sœur,