Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/329

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ordre de quitter le pays ; comme ils s’y refusaient, la cavalerie auxiliaire, envoyée subitement contre eux, leur fit une nécessité d’obéir, en tuant ou faisant prisonniers les plus opiniâtres.

21. Ces étrangers étaient des ambassadeurs parthes et arméniens.

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Ces mêmes champs furent envahis par les Ansibariens, plus redoutables que les Frisons, à cause de leur nombre et de la pitié qu’ils trouvèrent chez les nations voisines. Chassés par les Cauques, sans terre où se fixer, ils imploraient un exil tranquille. Un homme célèbre parmi ces peuples, et fidèle à notre empire, nommé Boiocalus, appuyait leur demande, en représentant "que, dans la révolte des Chérusques, Arminius l’avait chargé de fers ; qu’ensuite il avait porté les armes sous Tibère et Germanicus. Il venait, à cinquante ans d’obéissance, ajouter un nouveau service, en mettant sa nation sous nos lois. De ces champs inutiles, combien était petite la partie sur laquelle on transportait quelquefois les troupeaux de l’armée ! qu’on leur réservât, à la bonne heure, l’espace que l’homme abandonne partout aux animaux ; mais pourquoi préférer le voisinage d’un désert à celui d’un peuple ami ? Ce territoire avait appartenu jadis aux Chamaves, puis aux Tubantes, enfin aux Usipiens. La terre fut donnée aux mortels, comme le ciel aux dieux : les places vides sont un domaine public." Ensuite regardant le soleil, s’adressant à tous les astres, comme s’ils eussent été devant lui, il leur demandait "s’ils voudraient éclairer un sol inhabité. Ah ! qu’ils versassent plutôt les eaux de l’Océan sur les ravisseurs de la terre."

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Offensé de ce discours, Avitus répondit "qu’il fallait subir la loi du plus digne ; que ces dieux dont ils attestaient la puissance avaient fait Rome maîtresse de donner ou d’ôter, sans reconnaître d’autre juge qu’elle-même," Telle fut sa réponse publique aux Ansibariens : quant à Boiocalus, il lui dit qu’en mémoire de sa longue amitié il lui donnerait des terres ; et le Germain repoussa cette offre comme le prix de la trahison. "La terre, ajouta-il peut nous manquer pour vivre ; elle ne peut nous manquer pour mourir ; " et les deux partis se séparèrent également irrités. Les Ansibariens appelaient à leur secours les Bructères, les Tenctères, et même des nations plus éloignées. Avitus écrivit à Curtilius Mancia, général de l’armée du Haut-Rhin, de passer le fleuve et de se montrer sur les derrières des barbares. De son côté, il conduisit ses légions chez les Tenctères, et menaça de tout saccager s’ils