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Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/446

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Galba fut renversé de sa chaise par la précipitation de ses porteurs, et roula sur la poussière. Ses dernières paroles ont été diversement rapportées par la haine ou l’admiration. Suivant quelques-uns, il demanda d’une voix suppliante quel mal il avait fait, et pria qu’on lui laissât quelques jours pour payer le don militaire. Suivant le plus grand nombre, il présenta lui-même sa gorge aux assassins, les exhortant à frapper, si c’était pour le bien de la république. Les meurtriers trouvèrent que ses paroles étaient indifférentes. On n’est pas d’accord sur celui qui le tua. Les uns nomment l’évocat26 Térentius, d’autres, Lécanius. La tradition la plus répandue, c’est que Camurius, soldat de la quinzième légion, lui enfonça son épée dans la gorge. Les autres s’acharnèrent sur ses bras et ses cuisses (car la poitrine était couverte), et les déchirèrent affreusement. La plupart des coups furent portés par une brutale et froide cruauté, lorsque déjà la tête était séparée du tronc.

25. Endroit dans la place publique, ainsi nommé d’un marécage qui s’y trouvait aux premiers temps de Rome, et où s’enfonça Métius Curtius, général des Sabins, dans le combat livré par ceux-ci aux Romains, ou bien du gouffre qui, dit-on, s’y ouvrit plus tard et ne put être rempli que quand M. Curtius s’y fut précipité à cheval et tout armé.
26. On nommait evocati, les soldats qui, ayant fini leur temps de service, consentaient à s’enrôler de nouveau.

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On fondit ensuite sur Vinius, dont la fin donne aussi lieu à quelques doutes. On ignore si le saisissement lui étouffa la voix, ou s’il s’écria qu’Othon n’avait pas ordonné sa mort : paroles qui pouvaient être un mensonge dicté par la crainte, ou l’aveu qu’il avait part à la conjuration. Sa vie et sa réputation porteraient de préférence à le croire complice d’un crime dont il était cause. Il tomba devant le temple de Jules César, frappé d’un premier coup au jarret, puis achevé par Julius Carus, soldat légionnaire, qui le perça de part en part.

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Notre siècle vit ce jour-là un homme qui l’honore, Sempronius Densus. Centurion d’une cohorte prétorienne et chargé par Galba d’escorter Pison, il se jette, un poignard à la main, au-devant des soldats armés, et leur reprochant leur crime, les menaçant du geste et de la voix pour attirer tous les coups sur lui seul, il donna à Pison le temps de fuir. Pison parvint à se sauver dans le temple de Vesta, où il fut accueilli par la pitié d’un esclave public, et caché dans la demeure de cet homme. Là, moins protégé par la religion et la sainteté du lieu que par l’obscurité de sa retraite, il reculait l’instant