Page:Tagore - L’Offrande lyrique.djvu/33

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sont inspirés encore par le sentiment de cette dualité, dualité que commente ingénieusement ce charmant passage du Sadhana :

« Voyez, par exemple, la fleur. Si charmante qu’elle paraisse, elle est pressée de rendre un grand service. Sa forme et sa couleur ne sont qu’appropriées à son emploi. Elle doit mener à bien le fruit, sous peine d’interrompre la continuité de la vie de la plante et de laisser la terre prendre bientôt l’aspect du désert. La couleur de la fleur et son parfum ne sont qu’en raison de cela ; elle n’est pas plutôt fécondée par l’abeille, que voici venir le temps du fruit, que voici tomber ses délicats pétales et qu’une économie cruelle la contraint de résigner son doux parfum. Plus aucun loisir ne lui reste pour étaler au soleil sa parure ; elle est toute requise déjà.

« Vue du dehors la nécessité semble l’unique agent de la nature par quoi chaque chose est poussée. Par quoi le bouton tend à la fleur, la fleur au fruit. Par quoi le fruit répand sur le sol la semence. Par quoi la semence germe à nouveau, et par quoi la chaîne ininterrompue, ainsi, d’activité en activité se poursuit…

« Mais cette même fleur s’adresse-t-elle au cœur de l’homme, il n’est aussitôt plus question de sa