Page:Tailhade - Au pays du mufle, 1891.djvu/16

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

le fils de quelqu’un, ceux-là sont les aïeux que je vois à Laurent Tailhade et, comme en art surtout, le temps est une fiction, il est à la même distance, comme langue poétique, de l’un et de l’autre. De Gautier il a l’impeccabilité souveraine ; de Villon l’emportement lyrique et l’abondance cadencée du verbe. Son vers passe du frémissement de la lyre au claquement du fouet. Mais le poète, — pour qu’il existe, — et celui-ci est un des plus vivants que je sache — est avant tout lui-même. L’originalité de Tailhade, pour qui ce volume sera un peu ce qu’est les Châtiments dans l’œuvre lyrique de Victor Hugo, — car, qu’il le veuille ou non, comme nous tous, il en procède, — c’est une acuité d’ironie qui ne me semble jamais avoir été atteinte avant lui. Si le grand Flaubert avait vécu, il eût appris par cœur ces Quatorzains d’été, où Bouvard et Pécuchet sont plus cruellement déchirés de lanières que Matho lui-même à la dernière page de Salammbô. Autant de quatorzains, autant