Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/11

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phant de difficultés que l’on croyoit insurmontables, il a fait le canal de Morte Sana, qui porte les eaux de l’Adda jusque sous les murs de Milan. Cet ouvrage qui pourroit seul rendre un nom immortel, doit être placé parmi les plus importans de ceux de Léonard de Vinci.

Avide de toute espèce de science, à peine s’étoit-il profondément occupé d’une, qu’il en étoit détourné par le goût qu’il sentoit pour une autre ; il entassoit des connoissances bien moins pour le plaisir de les avoir, que pour celui de les acquérir ; et il cherchoit à tout savoir, non par ambition, mais entraîné par l’instinct vers tous les moyens que la nature lui avoit donnés pour être heureux. Cependant, comme il s’est adonné davantage à la peinture, c’est par elle qu’il a principalement acquis sa grande réputation. Ce fut lui qui contribua le plus à ramener, étendre et fixer le bon goût dans les arts : géant glorieux, il en débarrassa la carrière de tout ce qui empêchoit d’y courir ; les génies de Michel-Ange et de Raphaël purent la parcourir sans peine ; pour entrer dans la lice, le goût n’ouvrit la barrière qu’aux bons esprits et aux hommes éclairés ; on n’y trouva d’autre but que la