Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/120

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été tourmenté par la fureur des vents : ses sites n’ont jamais rien de terrible, rien de ces aspects sauvages et attachans qui font sur l’âme de profondes impressions ; tout rit dans ses charmans paysages ; on n’y craint point la rencontre des assassins, ni celle des bêtes féroces et des animaux vénéneux ; on n’y craint point l’intempérie des saisons ni les mouvemens tumultueux et effrayans de la nature, il peint toujours des campagnes heureuses qu’éclaire une lumière bienfaisante, mais il les peint avec plus d’esprit que de sentiment.

En voyant ses paysages aimables, l’imagination ne les peuple point d’amours, de génies, de fantômes plaintifs, ou d’amans malheureux ; elle n’y voit jamais Palès, ni la fière Diane, ni la blonde Cérès, ni le bel Adonis. Sans doute Berghem étoit heureux, et il avoit beaucoup plus d’esprit que de sensibilité. Ses bergers n’ont point la bonne et agreste simplicité des pâtres Flamands ; ils sont moins encore ces pasteurs favoris des Muses, qui, sous des chênes sacrés, charmoient les nymphes des bois par la douceur de leurs chants ; il n’ont point eux-mêmes préparé leurs tendres chalumeaux ; leurs flûtes ont été faites