Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/234

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Ses figures ont des formes triviales, mais elles n’ont point l’air d’avoir un mauvais naturel ; elles sont souvent occupées à des choses utiles ; elles inspirent la gaieté et non pas l’effroi ; et l’on ne craindroit pas de les rencontrer sur de grandes routes, comme celles de Salvator Rosa ; elles n’ont point l’air sot, et ne sont point déguenillées : l’on ne voit point sur leurs visages la physionomie des mendians avilis ; une sorte de fierté se montre sur leurs fronts ; et l’on voit qu’elles dédaigneroient d’être intrigans et lâches adulateurs.

La beauté du coloris de Van Ostade contribue beaucoup à sa réputation ; dans cette partie il est égal aux plus habiles artistes, et aucun peintre de tous les genres et de toutes les nations, n’a été coloriste plus fin, plus harmonieux que lui. Qu’on n’imagine pas cependant, comme certaines gens, que ce mérite soit presque le seul de ses ouvrages ; fussent-ils peints en grisaille, ils seroient encore admirables par l’effet de la lumière, par l’esprit, le mouvement et la vie : cela se prouve aisément, en rappelant les estampes gravées d’après ses tableaux, surtout celles qu’il a gravées lui-même à l’eau-forte, et qui ont tant de vérité et d’originalité.