Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/25

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lieux du monde, et de leur donner tant de vérité, qu’on diroit qu’ils ne sont que des portraits exacts de la nature. Il devoit cet avantage aux belles contrées qu’il habitoit, et à sa manière grande et naïve de copier ce qu’il voyoit. Aucun peintre d’aucun temps, d’aucune nation, n’a réuni autant de vérité à des formes aussi imposantes : pourquoi des lieux si beaux ne sont-ils pas la demeure de plus dignes habitans ? Soit qu’il peignît lui-même ses figures, soit qu’il les fît faire par d’autres artistes, elles n’ont pas le caractère de ses paysages, qui semblent destinés à être habités par les sages, les héros, les pasteurs antiques du Poussin. Dans ses marines admirables, on ne voit guère que des ports, bien rarement des tempêtes ; et il sentoit bien mieux le calme attendrissant de la nature, que son désordre majestueux.

Le genre du paysage est, sans contredit, un de ceux qui prouvent le mieux le charme et le pouvoir de la peinture. Si le paysagiste n’offre pas les riches intérieurs des palais fastueux, il peint les cabanes des bergers, asiles du repos, l’immensité des airs, le Dieu de la lumière, et la lune régnant sur les paisibles nuits ; il peint ces arbres, touchantes et su-