Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

temps où la peinture étoit divisée en plusieurs partis ; dans le temps où l’amour du dessin sévère et grand d’Annibal Carrache et de ses élèves, étoit balancé par celui de beaucoup d’artistes, pour la manière neuve et vigoureuse de Michel-Ange de Caravage, et pour celle de Josepm. Le Vouet fit d’abord des tableaux, tenant du goût du Caravage et de Valentin : son inclination sembloit le porter à une manière forte et facile, vers cette sorte de peinture qui étonne les yeux, bien plus qu’elle ne parle au cœur et à l’esprit. Dans la suite, il préféra surtout la promptitude et la hardiesse de l’exécution, à toutes les autres parties de la peinture. Il semble ne pas imaginer que ce bel art puisse jamais aller au cœur, et lorsqu’il peignoit, vraisemblablement il ne sentoit guère le sien s’émouvoir.

Le Sueur, son illustre élève, qui lui ressemble dans beaucoup de choses, est cependant un des peintres les plus touchans ; et rien ne prouve mieux que la partie des beaux-arts qui émeut, qui attendrit les âmes, ne tient point aux principes, à la science : elle est la fille enchanteresse de l’instinct ; son pouvoir peut s’accroître par les circonstances, il pourroit s’altérer, il ne sauroit s’acquérir.