Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/278

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versées, les plus grandes hautes de dix pieds ; toutes, simples rochers non taillés, plantées en terre par un de leurs bouts. — En soi, le spectacle n’a rien d’intéressant : les blocs de Fontainebleau sont bien plus vastes et leurs traînées sont d’un effet bien autrement grandiose. Mais, comme signe historique, ces pierres frappent beaucoup. Il fallait un âge bien barbare pour qu’on se contentât d’un pareil temple. Est-ce une œuvre de l’âge de pierre, antérieure à la connaissance des métaux ? Est-ce une œuvre de ces druides qui, vivant dans les bois et n’ayant pas de temple couvert, ont voulu, sur cette plage sans arbres, imiter les files de leurs forêts et consacrer de vagues intuitions géométriques ? En tout cas, ces blocs ont été remués par des bras nus de sauvages et des rouleaux. Il y a eu là des assemblées de guerriers, des sacrifices d’hommes ; et la bruyère, les ajoncs, le coin bleu de la mer à l’horizon sont les mêmes qu’alors.

Au sommet de la colline, quelques maisons se sont juchées entre les plus hauts blocs ; leurs lignes droites marquent les limites des jardins.