Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/94

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six heures du soir, était grandiose et lugubre. Elle est toute biscornue, déjetée d’un côté. Mais au dedans, dans l’obscurité, un pilier gigantesque montait, noirci, indistinct, parmi des clartés indécises, des tableaux énormes, des boiseries. Je ne trouve pas de mots pour rendre ces noirceurs insondables, vagues, mouvantes, à la Rembrandt, ce grandiose vaisseau rempli d’ombres. — La rosace gardait encore quelque lumière, douloureuse et mystique avec son incarnat violacé, ses figures étranges et entrelacées, les derniers scintillements de la sanglante magnificence. Comme c’est là le ciel, vu le soir en rêve, par un homme qui aime et qui souffre !




Beaucoup de promenades dans la ville, surtout le soir. Elle est bien tortue, bossue. « C’est un Poitiers endimanché », disait le colonel. Mais il y a du mouvement dans la rue, une foule sur la place, au café ; tout cela ondoie dans l’ombre noire rayée de lumière. — Ce n’est pas