Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/95

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une ville morte, c’est un centre, une capitale provinciale, fière d’elle-même. Elle a deux journaux fort répandus ; on les trouve chez le plus mince coiffeur ou gargotier ; ici, dans notre hôtel, qui est le meilleur, pas un journal de Paris. L’Aigle et le Journal de Toulouse s’occupent des événements locaux, de tel chanteur du pays qui vient de débuter à Lyon. Léotard, le gymnaste, est d’ici, ils s’en font un titre de gloire. Ils ont un correspondant, un certain monsieur du pays, qui traite les hautes questions politiques. Je vois plusieurs libraires ; l’un très bien fourni, avec les livres nouveaux et les réfutations de Renan, même les réfutations des réfutations. — Les gens soignent leur toilette ; les hommes ont l’air pimpant et propret, avec leur barbe noire bien taillée en brosse, leur redingote serrée à la taille. — Ce sont des diminutifs d’Italiens avec un air de coiffeur. — Mon soldat, hier (il est de Bar-le-Duc), m’en disait du mal. « Ils sont menteurs, craqueurs toujours, et ce ne sont pas des gens qui aient des mœurs. — Qu’est-ce que vous voulez dire par là ? — Eh bien, quand ils sont au théâtre, ils sifflent, sif-