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Page:Taine - De l’intelligence, t. 1, 1888.djvu/17

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PREFACE 7

ration en génération, on a bâti. La psychologie aussi a le sien, d’autant plus élevé qu’elle remonte à l’ori- gine de nos connaissances et dépasse tout de suite le point de vue ordinaire, qui est bon seulement pour l’usage et la pratique. — Au sortir de ce point de vue, on s’aperçoit qu’il n’y a rien de réel dans le moi, sauf la file de ses événements ; que ces événe- ments, divers d’aspect, sont les mêmes en nature et se ramènent tous à la sensation ; que la sensation elle- même, considérée du dehors et par ce moyen indirect qu’on appelle la perception extérieure, se réduit à un groupe de mouvements moléculaires. Un flux et un faisceau de sensations et d’impulsions*, qui, vus par une autre face, sont aussi un flux et un faisceau de vibrations nerveuses, voilà l’esprit. Ce feu d’arti- fice, prodigieusement multiple et complexe, monte et se renouvelle incessamment par des myriades de fusées ; mais nous n’en apercevons que la cime. Au- dessous et à côté des idées, images, sensations, impul- sions éminentes dont nous avons conscience, il y en a des myriades et des millions qui jaillissent et se groupent en nous sans arriver jusqu’à nos regards, I si bien que la plus grande partie de nous-mêmes reste i hors de nos prises et que le moi visible est incom- ! parablement plus petit que le moi obscur. Obscur ou . On aiiouie ici V impulsion f^arce qu’elle est l’événement élé- mentaire dont les composés forment les émotions et la volonté, de même que la sensation est l’événement élémentaire dont les composés forment les idées et la connaissance. Nous prenons le mot impulsion au sens psychologique et non au sens méca- nique.