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LES GOUVERNÉS


tribunaux civils, administratifs et criminels, places de trésorier, de contrôleur, de receveur dans les diverses branches de l’impôt, toutes ces charges et beaucoup d’autres encore avaient été, depuis un siècle et davantage, aliénées par l’État contre deniers comptants ; dès lors, elles étaient tombées aux mains des particuliers acquéreurs ; chaque titulaire possédait la sienne au même titre qu’un bien-fonds, et pouvait légalement la vendre comme il l’avait achetée, à prix débattu et sur affiches[1]. — D’autre part, dans chaque ville, les différents groupes de fonctionnaires locaux étaient formés en corporations, pareilles à nos chambres de notaires et à nos syndicats d’agents de change : la petite société avait ses statuts, ses assemblées, sa caisse, souvent la capacité civile et le droit de plaider, parfois la capacité politique et le droit d’élire au conseil municipal[2] ; par-

  1. Albert Babeau, la Ville sous l’ancien régime, 26. — (Annonces dans le Journal de Troyes, 1784, 1789) : « Vente d’un office et charge de conseiller au grenier à sel à Sézannes ; rapport annuel, 8 à 900 livres ; on désirerait en trouver 10 000 livres. » — « Une personne désirerait acheter dans cette ville (Troyes) une charge de magistrature ou de finance ; elle y mettrait depuis 25 000 jusqu’à 60 000 livres et plus ; cette personne payera comptant, si on l’exige. »
  2. Tocqueville, 356. L’assemblée municipale d’Angers comprend, entre autres membres, deux députés du présidial, deux des eaux et forêts, deux de l’élection, deux du grenier à sel, deux des traites, deux des monnaies, deux des juges consuls. — Le système universel, dans l’ancien régime, est le groupement de tous les individus en corps et la représentation de tous les corps, surtout de tous les corps de notables. L’assemblée municipale d’Angers comprend, en conséquence, deux députés du corps des avocats et procureurs, deux du corps des notaires, un de l’université, un du chapitre, le syndic des clercs, etc. — À Troyes (Albert


  la révolution, vi.
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