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LA STRUCTURE DE LA SOCIÉTÉ


en Normandie, la cure ne vaut pas plus de 400 livres que le curé partage avec un obitier, et il y a 500 habitants, dont les trois quarts à l’aumône. » — Comme les réparations du presbytère et de l’église sont d’ordinaire à la charge d’un seigneur ou d’un bénéficier souvent éloigné, obéré ou indifférent, il arrive parfois que le prêtre ne sait ni où loger, ni où dire la messe. « J’arrivai, dit un curé de Touraine, au mois de juin 1788… Le presbytère ressemblerait à un souterrain hideux s’il n’était ouvert à tous les frimas et à tous les vents » : en bas, deux chambres carrelées sans portes ni fenêtres, hautes de quatre pieds et demi, une troisième haute de six pieds, carrelée, servant de salon, de salle, de cuisine, de buanderie, de boulangerie et d’égout pour les eaux de la cour et du jardin ; au-dessus trois pièces semblables, « le tout absolument lézardé, crevé, menaçant ruine, sans portes ni croisées qui tiennent », et, en 1790, les réparations ne sont pas encore faites. — Voyez par contraste le luxe des prélats qui ont un demi-million de rente, la pompe de leurs palais, les équipages de chasse de M. de Dillon, évêque d’Évreux, les confessionnaux garnis de satin de M. de Barral, évêque de Troyes, l’innombrable batterie de cuisine en argent massif de M. de Rohan, évêque de Strasbourg. — Tel est le sort des curés à portion congrue, et il y en a « beaucoup » qui n’ont pas la portion congrue, que la mauvaise volonté du haut clergé en exclut, qui, avec leur casuel, ne touchent que 400 à 500 livres, qui réclament en vain la maigre pitance à